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30 – Petite balade

Les deux chauves-souris qu’avait appelées Qraem’terh du clocher d’Erestia, et un pigeon qu’il avait repris à la mort voletaient tous trois dans la nuit entre arbres et clairières. Tout en attendant le retour des deux premières, il trottait sur un cheval volé, avec comme compagnon de route une espèce d’Orc aux crocs de sanglier, se trouvant attaché entre trépas et sublimation sur la croupe du quadrupède.
Décidément si la confrérie avait su prédire le moment et le lieu de sa mission, il fallait noter, et apprécier que les renifleurs de magies avaient eu la même intuition. À cette pensée, il fut même touché par ce résultat surprenant. Les méthodes d’approches ne pouvaient être similaires bien sûr, car des siècles de magie noire ne pouvaient se comparer à de rustres ressentis venant de pourceaux de ce genre.
Il avait entendu dire que certains êtres, de mixités sociales fort différentes, avaient des capacités que personne ne soupçonnait, et souvent même pas ces personnes elles-mêmes. C’était un sujet de débats théologiques entre les mages noirs, sur : comment une cité avait pu insuffler à ses anciens habitants un pouvoir concentré, mais difficile à appréhender, et surtout à maîtriser par de complets novices. C’était comme si la magie, ou quelque chose qui l’avait transformé, avait été vivante et capable de se transmuer pour assurer sa pérennité. Une énigme qui perdurait dans le temps.
Peut-être que ce soir il aurait un élément de réponse. Si c’était le cas, il se rapprocherait à n’en pas douter d’une marche de plus vers le cercle très fermé de ses compagnons dirigeants. Encore fallait-il en éliminer un ou deux de manière opportune, et ça, son sourire naissant témoignait qu’il en avait déjà une idée.
Deux des chauves-souris qui revenaient le voir s’approchaient, en un vol bancal et peu orthodoxe, passablement désorientées par leurs nouvelles orientations. Il fallait constamment renouveler leurs liens d’appartenance à leur nouveau maître.
— Min’tsa Getsui, toi, reste à voleter aux alentours pour voir ce qui se passe, et toi, Hem’ka har pask’rat, passe devant !
Les deux bestioles s’exécutant, il regarda dans une des poches de sa besace pour voir combien de concentré d’âmes il lui restait dans sa robuste vessie d’orc, encore tiède. Suffisamment. Il n’aurait pas besoin de s’en procurer encore. Pour le moment, il fallait rejoindre le pigeon veillant sur le lieu adéquat.
Une clairière passée, une forêt peu dense accueillait son nouvel invité de passage. La première chauve-souris guidait le cheval, qui calmement passait par-dessus un tronc couché, puis des fourrés buissonnants, pour parvenir à une trouée de la canopée forestière qui plut tout de suite au peut-être futur mage.
— Bon. Ça semble pas mal. Regroupez-vous devant moi !
Les six battements d’ailes tournoyèrent quelques secondes autour du cheval et de son cavalier, pour se poser deux toises plus loin. D’une courte incantation et d’une ligne sinueuse imaginaire formée par son index droit, il libéra les trois âmes prisonnières.
— Bon travail les gars. Partez vite, et n’oubliez pas à qui vous devez votre salut.
Il descendit de sa monture, posa sa besace au sol, détacha l’individu mi-Orc, mi-sanglier qui le répugnait toujours, et l’adossa à un arbre. Il se dégourdit un peu les membres, mangea un bout de viande séchée et but à une petite fiole souple. Les préparatifs pouvaient maintenant commencer.

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Auteur de ce chapitre : Perplex.

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