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61 – La blessure de Blue

Roland pose ses mains sur les épaules d’Anthéa. Il parle d’une voix calme, apaisante :
— Qui je suis ? Tu le sais : Roland. Ne pas voir mon visage te semble si insupportable ? Crois-tu vraiment que les traits de mon visage font ce que je suis, qui je suis ? Si me montrer à toi est ce qui te ramènera, je le ferai. Mais est-ce ce qui te perturbe ?
— Oui. Mais non. Pardon Roland. Mes rêves cette nuit m’ont menée à Alastyn et il était là. Il riait et me disait qu’il m’attendait. Je ne pouvais pas voir son visage… Je… Excuse-moi.
— Je n’ai pas à t’excuser. Je comprends la coïncidence de deux visages que tu ne peux voir te perturbe, c’est normal, la tension est trop forte autour de toi. J’ai d’autant moins à t’excuser que tu pourrais fort bien utiliser ta voix de persuasion pour me contraindre à te montrer mon visage, et tu ne le fais pas. C’est un signe de grand respect, je t’en remercie, et comme je te respecte tout autant, je vais souscrire à tes souhaits.
— Capitaine, puis-je emprunter votre cabine ?
Celui-ci ayant donné son accord Roland prend la main d’Anthéa et la guide jusqu’à la cabine dans laquelle ils entrent.
Sue rameute les autres membres du ka-tet.
— Roland va tomber la capuche ! Allez, venez, nous allons jeter un œil ou deux. Hi hi hi !
Timothée est emballé par l’idée, Ainu et Adèle protestent un peu, mais Ainu ne sait pas résister à Sue, et elle est curieuse aussi d’en savoir plus sur Roland. Adèle bien qu’indifférente à la chose, reste solidaire de ses compagnons et donc suit le mouvement.
À l’intérieur de la cabine Roland n’a rien perdu du remue-ménage que fait le quatuor dans la coursive, souriant dans sa capuche, il installe Anthéa dans le fauteuil du capitaine, puis content de lui, fait face à la porte et rejette la capuche du shaed dans son dos.
Anthéa est fascinée par son regard, elle ne s’attendait pas à ça, elle a du mal à croire ce qu’elle voit, en entendre parler est une chose, , mais cela explique beaucoup de choses, elle est sereine maintenant et cette sérénité vient d’elle, il ne l’a point influencé, c’est pour elle, une certitude.
Dehors profitant de l’avantage que lui confère, pour une fois, sa taille, Sue est la première à regarder par le trou de la serrure.
— Bof ! c’est un , plus proche de moi que de vous autres.
Tim la pousse doucement pour prendre sa place.
— Vieux chauve oui ! Mais quelles oreilles, il me rappelle quelqu’un… , l’ancêtre des Jedis ?
C’est maintenant au tour d’Ainu qui se fait prier, mais Sue insiste.
— Allez, regarde, c’est rien qu’un vieux crouton !
Ainu est sidérée par ce qu’elle voit.
— Mais c’est un… c’est un gwath !  Ce n’est pas possible ?
Adèle qui n’attend rien de cette information regarde à son tour.
— Je ne comprends rien à ce que vous racontez ! Bon, il est bizarre, mais c’est
L’incompréhension se lit sur le visage de chacun. Tous renoncent à s’expliquer avec les autres qui ne peuvent comprendre.
Anthéa et Roland le sourire dissimulé par la capuche ressortent de la cabine.
— Pardons, pardons !
Demande-t-il ostensiblement avant de s’adresser à Anthéa ?
— Que te disait ce rêve, comment as-tu atteint Alastyn ?
Anthéa explique au ka-tet la voie à suivre, n’oubliant aucun détail, expliquant qu’ils auraient besoin d’un système pour faire descendre Enbarr de la caravelle, et comment ce système leur permettrait d’accéder au mont perdu.
***
Sur sa barque, Anthéa attendait Blue.
Blue !
Elle ne cessait d’appeler son loup. Mais il ne semblait pas être là. Aurait-il décidé que ce groupe n’était pas ce qu’il souhaitait ? Aurait-elle dû user de son don de persuasion ? Anthéa ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter. Elle ne pouvait pas partir sans lui. Elle en était persuadée.
Adèle, présente bien malgré elle dans la barque, commençait à s’impatienter.
— Il ne viendra pas ! C’est un loup. Que veux-tu qu’il fasse avec nous ? Je sais que tu tiens à lui, Anthéa, mais je suis désolée… Il nous faut partir. C’est trop dangereux. Je ne peux pas battre un démon !
Anthéa insiste encore un peu.
— BLUE !
Elle ne peut se résoudre à partir. Elle entend soudain un hurlement… mais c’est le hurlement d’un homme qui souffre. Des cris résonnent dans les bois environnants… Un jappement…
— BLUE !!!
***
Dans les bois, non loin d’une anse, deux silhouettes se dessinent dans les ombres de la nuit.
— Je vous dis qu’elle viendra ! Vous aurez votre monnaie d’échange pour le petit.
— Et qui te dit qu’elle viendra ?
— Elle veut son loup à ses côtés. Nous devons saisir notre chance. Je sens ses émotions… Hummm… Un délice. Que ne donnerais-je pour qu’elle soit la proie ?
— Cessez ! C’est le garçon que je veux.
— Oui… bien sûr… mais c’est grâce à elle que nous l’aurons. Ils veulent tous secourir cette île. Sans elle, ils ne peuvent rien. Ils nous donneront le garçon en échange.
— Oui, mais la question reste entière… est-elle une proie ? N’est-ce pas un prédateur comme toi ?
— Cette biche apeurée ? J’en ferai un amuse-gueule !!!
***
Blue reste tapi dans les fourrés. Il examine ces deux êtres… Il les a déjà sentis. Ce sont ceux, qui selon sa lumineuse, ont tenté de l’attaquer en se faisant passer pour lui. Ses babines se retroussent… Il contient un grognement furieux. Se faire passer pour lui auprès de sa Lumineuse, et pour lui faire du mal… Sa colère ne cesse de monter. Il se focalise sur celui dont il ressent les pensées… Une proie.
Il bondit hors des fourrés et attaque le professeur Usher. Milory Camighan regarde sans intervenir un sourire narquois aux lèvres.
Le professeur tente d’interposer sa canne, mais il est trop tard. Il invoque donc les chaînes d’or pour se débarrasser de ce loup monstrueux… Il est bien plus gros que les loups habituels et bien plus fort. Les chaînes tentent de s’enrouler autour de l’animal, mais bien trop leste et rapide, Blue arrive à déjouer les pièges. Changeant de tactique, Usher se sert des chaînes comme de massues et martèle le dos de Blue. Ce dernier jappe de douleur. Sa peau est lacérée à de nombreux endroits. Il doit battre en retraite.
Il entend distinctement l’appel paniqué d’Anthéa, et s’inquiète d’un coup qu’elle puisse venir à son secours et plonger droit dans un piège. Il détale donc droit vers elle malgré les élancements que lui infligent ses blessures.
***
Anthéa perçoit immédiatement l’inquiétude de Blue à son égard.
Je suis là. Comme promis. Je ne bouge pas, mais viens à moi, je t’en conjure…
Il arrive, ralentissant au fur et à mesure. Ses blessures lui infligeant de plus en plus de douleur. Il ne se laissera pas aller, mais il lui semble de plus en plus dur d’avancer jusqu’à sa Lumineuse.
Enfin, elle est là, la mine inquiète, ses bras brillants de mille feux, sa robe et ses cheveux volant au gré d’un vent imaginaire… Blue s’arrête, étudiant ce qu’il voit. Mais c’est bien elle… Crinière rouge est avec elle, l’épée au clair surveillant les alentours.
Anthéa écarquille les yeux en voyant Blue ensanglanté… Alors qu’elle allait s’élancer, Adèle lui rappelle :
— Est-ce lui ?
Anthéa soupire et se résigne…
— Qui es-tu ? demande-t-elle de sa voix de persuasion…
Blue
— Blue, dit-elle…
Et elle s’élance. Aidant de son mieux le loup elle le ramène à bord de la barque. Ils repartent ainsi vers la caravelle. Allongée contre Blue, Anthéa le rassure du mieux qu’elle peut, passant ses mains dans sa fourrure. Une bulle bleutée se forme autour d’eux, cocon de protection où rien ne peut plus les atteindre.
Lorsqu’ils montent à bord, Blue doit être porté tellement il est faible. Ainu se précipite.
Le loup gronde et montre les dents. Oreilles pointues ne me touchera pas, les pensées dans la tête de l’elfe sont incompréhensibles elle pense “magie” “soigner” elle ne doit pas le toucher.
Au moment où le loup s’apprête à mordre, Anthéa lui attrape doucement la tête. Le loup de détend :
ma lumineuse veut que je laisse oreilles pointues me toucher… Elle dit que ce n’est pas pour prendre le contrôle, je ne comprends pas, elle me dit juste de la laisser faire ce qu’elle sait faire.
Ainu regarde Anthéa qui fait un signe de tête. Elle passe ses mains dans la fourrure du loup.
C’est drôle, les mains d’oreilles pointues sont douces elles aussi, et chaudes. Ma douleur s’estompe. C’est bon…
Le loup se redresse brusquement et se remet à gronder en regardant Ainu. Il est encore blessé, mais maintenant, c’est une blessure qu’il connait, la douleur et la paralysie ont disparu.
— C’est fini, j’ai neutralisé la magie, le reste dépend de lui.
Anthéa reprend le loup dans ses bras, et rétablit la bulle bleue.
La caravelle se met en route

***
Notes :
Les têtes de Roland sont pour :
Anthéa : d'après un dessin de Boris Vallejo.
Sue : d'après une carricature de Clint Eastwood par Bryant Arnold.
Timothée : d'après la photo d'une sculture d'Andrea Eusebi.
Ainu : d'après une création 3D de Yoji, sur le site 3dvf, en mars 2016.
Adèle : d'après une photo d’exploitation du film Fantomas, d'André Hunebelle.

***
Auteur de ce chapitre : Nathdse.
(images de Roland fournies par scifan, préalablement à l'écriture).

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